lundi 25 août 2025

5969

J'ai vu, le cœur serré, s'user jour après jour le tablier de la servante, j'ai frémi quand a grincé le volet de la chambre où Mary Shelley écrivait Frankenstein, j'ai observé que les milans désertaient le ciel du lac quand les canetons devenaient trop lourds à enlever, j'ai suffoqué toute la nuit dans le plafonnier, j'ai pleuré sur le passé de la fille et du garçon. Suis-je vraiment une brute insensible ?


J'ai éprouvé dans ma chair la honte du gros cycliste arrêté dans la pente, j'ai laissé la guêpe butiner ma côtelette, j'ai plaint l'homme patibulaire au crâne fendu dans Stevenson, j'ai cherché dans tous les dictionnaires un joyeux synonyme pour la mélancolie, j'ai pleuré sur le présent de la fille et du garçon. Suis-je vraiment une brute insensible ?


J'ai repris chez Dilou une part de son quatre-quarts sans beurre, ni farine, ni œufs, ni sucre, j'ai tissé pour l'araignée les soies de mon torse et de mes flancs, j'ai souri à des dents noires, j'ai embrassé le crépuscule d'hiver, j'ai aidé de la main le flocon à atterrir en douceur, j'ai pleuré sur le devenir de la fille et du garçon. Suis-je vraiment une brute insensible ?