Plus le temps passe, plus je m’éloigne de la mort (subite du nourrisson).
Elle crocheta ses
épingles à nourrice sur ses tétons, et les frères de lait devinrent frères de
sang.
Ce doit être tout ça que contemple l’admiratif dans l’administratif.
Plus le temps passe, plus je m’éloigne de la mort (subite du nourrisson).
Elle crocheta ses
épingles à nourrice sur ses tétons, et les frères de lait devinrent frères de
sang.
Ce doit être tout ça que contemple l’admiratif dans l’administratif.
Mon regard à travers une vitre croise celui du chat de la maison. Aussitôt il est évident pour lui comme pour moi que nous nous sommes connus dans une vie antérieure. Il était l’homme, et moi le chat. Chacun son tour, semble-t-il me dire en se pelotonnant sur son coussin.
Si je ne cours pas, je
vais rater mon train, je le sais, mais si je cours, que vais-je rater
d’autre ?
Fuite d’eau, rage de
dents, vélo volé, novembre ne se montre jamais avare de plaisirs. Il est bien
étonnant qu’il ne parvienne pas à courir jusqu’aux fêtes de Noël.
Tes belles joues rondes aussi vont fondre. Tout cercle, crevé en son centre par la pointe du compas, finit par se dégonfler.
L’escargot n’aime pas la pluie non plus. S’il
sort la tête sous l’averse, c’est parce qu’il sait qu’alors l’homme a rentré la
sienne, sa vilaine tête de gobeur d’escargots.
Je me suis réveillé
dans mon cercueil, sous la terre. Vous imaginez l’angoisse, la panique :
je n’avais pas mes bouchons d’oreille !
[Prochaine étape du Marathon autofictif de Christophe Brault à la Maison de la poésie, le mercredi 11 décembre à 20h. Réservation recommandée.]
Oh, cette pénétrante et douloureuse intelligence des choses, cette atroce lucidité des lendemains de sobriété !
Horrible, difforme,
contrefait, on comprend pourquoi il se cache ainsi derrière un bouquet, le
bonhomme géranium.
À ce que je sache, Dieu
seul le sait. Mais sauf erreur de ma part, il se trompe.
Je n’emporte plus mon corps partout désormais. Autrefois, il courait devant. Il se mêlait de tout. Et comme il gesticulait ! Je le laisse de plus en plus souvent sur son fauteuil, alourdi, un verre à la main, et je m’éclipse discrètement. Quand je reviens à lui, il ne s’est seulement pas rendu compte de mon absence.
Avec quelle patience
l’arbre échafaude la flamme !
Musaraigne, scarabée,
dorade, jaguar, orang-outan, rossignol… la plupart des animaux ont été gâtés
par la culture : ils portent de bien jolis noms.
– Ça me fait chier ! Ça me casse les couilles !
– Eh bien, mon garçon,
il s’en passe des choses dans ton slip !
Très nocive aussi pour
le poumon de la planète, la cigarette : un mégot mal éteint et l’Amazonie
s’embrase.
70 km/h ! C’est l’autruche qui laisse courir sa plume.
Perec, Duras, Robbe-Grillet, Tournier… le col roulé fut très en vogue chez les écrivains durant quelques années. Je suppose qu’ils n’avaient alors qu’à recroqueviller leurs orteils et leur prose sortait du tube.
Une
rangée de cyprès m’aurait coûté trop cher. Je n’en ai qu’un. Mais il fait les
cent pas.
Es-tu
bien sûre de vouloir mettre cette fleur dans tes cheveux ? Le moustique
mâle viendra peut-être te tourner autour en attendant l’occasion de fondre sur
toi, l’ignoble brute, pour en butiner le nectar.
Un rocher s’effrite dans l’ampoule supérieure du sablier. Il va nous falloir bien de la patience avant de retrouver les plaisirs de la plage.
La brebis
galeuse est facile à repérer. Tout le troupeau la suit.
Vaut-il
mieux décliner en regardant derrière soi le sommet qui s’éloigne ou devant soi
l’abîme qui se creuse ? J’hésite.
Les écrivains sont bien aimables de nous demander de brûler leurs manuscrits, mais s’ils s’imaginent que c’est avec ça que nous allons chauffer nos maisons… Des prétentieux, décidément !
Révolutionnaire
maniaque, je me cache avec mes guérilleros dans un jardin à la française.
Comme ils
sont sinistres et lamentables, et funèbres du matin au soir, les 22 novembre,
pas un pour racheter l’autre depuis 15 ans !
Je n’ai pas arrêté de boire : je laisse vieillir mon vin.
Dans chaque buisson se
cache le renard qui pourrait s’y cacher.
Le fil de l’horizon est
tendu à se rompre, ce qui finira inévitablement par arriver, et alors…
[Je rappelle que l’Arbre
vengeur a ouvert une
souscription pour l’acquisition du prochain volume de ce journal, L’Autofictif
travaille son dribble en forêt, qui paraîtra en janvier mais que les
souscripteurs recevront mi-décembre, orné d’une dédicace qui en démultipliera
considérablement la valeur, mais pas le prix ! Sachez que cette entreprise
est économiquement de plus en plus fragile et qu’un peu de trésorerie nous
permettrait de ne pas l’interrompre trop brutalement. Menace bien réelle, hélas.]
Ce même couple de vieillards cacochymes souvent occupe la table qui a ma préférence dans le café où j’ai mes habitudes. Non moins souvent, pourtant, il libère celle-ci cinq minutes après mon arrivée. Je la guigne depuis mon coin, prêt à bondir.
Mais le temps
nécessaire à un vieillard cacochyme pour rassembler ses affaires, se lever,
enfiler son manteau, redoublé par celui qu’il faut aussi à une vieillarde
cacochyme pour en faire autant prolongent interminablement cette attente
stérile. Et j’en viens à souhaiter la disparition de l’un au moins de ces
cacochymes.
Je ne sais pas, il
pourrait entreprendre un tour du monde à la voile ou refaire sa vie aux
antipodes avec un nouvel amour. Par exemple.
L’écrivain maudit ses semblables de vivre avec si peu d’imagination. Il doit tout inventer.
Car l’homme se répète
depuis l’origine. Le progrès technique n’est que le développement d’une musculature
qui gagne en force et en souplesse à force d’entraînement.
Ayant passé le filet en
le tirant derrière moi comme nous faisons, nous autres tennismen bien élevés,
pour effacer nos traces sur la terre battue du court après le match, j’ai vu en
me retournant des dizaines de poissons frétillant pris dans ses mailles :
je vous laisse imaginer ma surprise.
J’ai une nouvelle fois su faire montre de ma capacité à hausser mon niveau de jeu dans les moments importants. Il s’agissait d’orchestrer la rencontre entre Herzéloïde et Théobald, scène cruciale de mon roman dont je me suis sorti avec une grande maîtrise et assez d’audace cependant pour faire la différence. Vamos !
On en foule toujours le
même côté. Les pavés sont pipés.
Or c’est presque
toujours le bœuf, plus sagace que nous ne le pensions, donc, qui retrouve
l’aiguille dans la meule de foin.
Plus de papier, plus d’encre ? Qu’importe ! La limace écrira avec sa bave sur une feuille de laitue !
Chassez l’artifice, il
revient à trottinette électrique.
Pas un poisson, pas un
oiseau. Une fois encore, le pied et la main rentrent bredouilles.
a beau tourner se traîne
doublée par le lichen
à trop tourner s’érode
poussière à Rhodes
à mal tourner s’enlise
de travers à Pise
à tant tourner la
sphère
son orbite une ornière
Non seulement cette idée m’a échappé avant que je ne la note, mais nulle autre ne peut éclore ou se loger dans cette béance douloureuse, la place est prise quoique inoccupée. Cervelle nécrosée. Tête trépanée. Combien de ces coups de cuillère pour vider complètement un crâne ?
pour une silhouette
étique
au choix un bon
émétique
ou une vie érémitique
Mais le trône du
crapaud est un siège éjectable.
Certes, les années passant, j’ai dû desserrer ma ceinture d’un cran, puis de deux, puis de trois. En revanche, je boucle mon bracelet-montre aujourd’hui aussi étroitement qu’à vingt ans. Or l’important pour un écrivain n’est-il pas de garder le poignet fin et délié ?
Pour joncher ainsi le
sol, il faut bien que ces feuilles mortes aient été tuées.
Ce coup d’épée dans
l’eau dont tu te moques, c’était pour en tremper l’acier avant de te
pourfendre, maraud !
L’écrivain absolu connaîtrait toutes les langues, ainsi irait-il chercher tantôt dans le mandarin, tantôt dans le wolof ou le serbo-croate, la nuance la plus juste, le mot le plus pertinent pour servir son idée ou son propos. Babel de la clarté et de la précision.
Bon tireur ou non,
celui qui visait l’éléphant et tue le colibri ?
Timide dans l’enfance,
il s’est affermi en vieillissant, il est devenu lâche.
Alors qu’il écoutait les actualités en accéléré (x2) sur son téléphone, celui-ci cessa soudain d’émettre. Ce silence l’étonna, d’abord, puis il comprit que la vitesse du flux excédant celle du passage du temps l’avait précipité dans l’avenir, où nul événement ne s’était encore produit.
Seul le grand virtuose peut rester assis plus
de quelques secondes sur le tabouret d’un piano de rodéo.
Et c’est cette vieille
faux rouillée qui prétendait me faucher à la fleur de l’âge ?
Contrairement à la plupart des oiseaux, le perroquet se reconnaît dans le miroir. Il comprend tout de suite qu’il s’agit bien de lui en train de s’imiter.
Des mathématiques
nostalgiques ? Des mathématiques colériques ? Des mathématiques
amoureuses ? Inimaginable. Et pourtant, les mathématiques ne sont pas
imperméables à l’émotion et je me flatte moi-même d’avoir su leur inspirer de
la honte et du désespoir.
Pour être bien certain
de passer inaperçu, il faudrait pouvoir – mais cette opportunité se présente
trop rarement – se tapir derrière un tapir.
Cela m’a soudain frappé ce matin comme je marchais dans la rue, je ne rêvai pas, le phénomène était insidieux mais indéniable : tout le monde était plus vieux qu’hier ! Ne paniquons pas. Il faut attendre. Mais si la chose se confirme demain, si elle se vérifie après-demain encore, alors il y a aura de bonnes raisons de s’alarmer. Il conviendra de prendre des mesures urgentes. Sans quoi, je préfère vous laisser imaginer comment ça va finir…
J’ai quitté
l’animalerie furieux. Ils n’avaient pas de saucisson !
Frères humains qui
après nous vivez, renoncez aux poutres apparentes.
Elle lit chez son coiffeur un magazine féminin vieux de huit jours sur la recommandation duquel elle se fait aussitôt liposucer les lobes d’oreilles et acquiert une robe-chapeau en fibre d’orties. Hélas, le numéro suivant a ringardisé son look et voici qu’elle est la risée de ses amies aux narines cousues dans leurs cuissardes à bretelles.
Le sanglier fait bien
du dégât dans nos cultures, mais force est d’admettre qu’il remet toujours les
livres à leur place dans la bibliothèque.
Après avoir inventé le
sabre et le casse-tête, tu as vraiment cru réparer tes torts avec l’agrafeuse
et le sparadrap ?
Le vote pour la présidence du bureau directeur de la Communauté des Propriétaires de Teckels de Dijon, laissée vacante depuis le retrait pour raison de santé de Louis-René Planchet, a réservé à ses membres une surprise de taille puisque c’est un Américain du nom de Donald Trump qui a été élu avec plusieurs millions de voix d’avance sur Madame veuve Planchet, laquelle n’en totalise que douze, pour sa part, soit tout de même 93% des inscrits
Des soupçons de fraude
entachent donc cette élection. Il se murmure de surcroît que ce Monsieur Trump ne
serait pas domicilié à Dijon et, plus grave, qu’il ne posséderait pas de teckel.
Il se pourrait aussi que les hackers russes missionnés pour favoriser son
élection en biaisant les résultats sortis des urnes se soient trompés de
scrutin.
Quoi qu’il en soit, Madame
veuve Planchet qui briguait la fonction depuis plus de vingt ans est bien
décidée à ne pas en rester là. Elle appelle ses partisans à prendre d’assaut le
Palais des Ducs de Bourgogne dès ce soir. Venez avec vos chiens.
Allons-nous vraiment devoir supporter à nouveau quatre années durant ce vieux mâle orange, ses vociférations insanes, son obscénité politique ? Ou l’isolationnisme et le protectionnisme qu’il promet à ses électeurs, les yeux au ciel et la main sur les couilles, nous épargneront-ils en effet ce pénible spectacle, jalousement réservé aux Américains ? Président Trump, avez-vous songé à enceindre votre grand pays d’un mur anti-bruit ?
On pourrait nous croire
très souples tant le système est bien huilé.
Puis, ayant médité les
leçons de l’histoire, je renonçai à affronter une coalition d’Anglais et de
Prussiens à Waterloo.
Ce secrétaire qui appartenait à mon arrière-grand-père posséderait un tiroir secret, selon la légende familiale. Je ne l’ai pas cherché, n’ayant jamais compris pourquoi l’on consacrait autant d’ingéniosité à dissimuler une chose aussi commune et creuse qu’un tiroir.
On raconte que Damoclès
parvint à se dérober à la menace de l’épée en se réfugiant dans une grotte. Où il fut tué par la chute d’une stalactite.
Jamais assez fuselée,
la jambe, ou nous n’aurions qu’à bondir pour alunir.
Quel est donc ce canari qui sort sans le briser de son œuf de verre et volette d’un mur à l’autre du salon à la vitesse de 299 792 458 m/s ?
Pourquoi en effet ne
pas démonter la tour Eiffel maintenant que tous les choux à la crème ont été
mangés ?
C’est en la voyant
ruminer que nous comprenons pourquoi la vache est reliée plein cuir.
Depuis que Van Gogh a repeint les blés, les tournesols, les iris, les corbeaux et les étoiles, on les voit mieux.
Puisque l’ours est
omnivore, me dira-t-on en vertu de quoi il est dispensé de gratin de
chou-fleur ?
L’hévéa produit le
papier et la gomme. L’écrivain intelligent fera plutôt la sieste dans son
ombre.
C’est un phénomène que l’on observe dans plusieurs villes européennes, y compris Paris, aux Buttes-Chaumont : les perruches échappées de leurs cages forment des colonies actives et fécondes qui colonisent les espaces verts.
Ces oiseaux possédant
comme tous les psittacidés un talent inné pour l’imitation, je suggère de leur
apprendre durant leur captivité les chants et les trilles des espèces
vernaculaires de nos campagnes qui disparaissent les unes après les autres.
Ainsi, lorsqu’il n’y
aura plus que des perruches dans le ciel d’Europe, entendrons-nous toujours
pépier et siffler le merle, la fauvette, le roitelet et le rossignol.
Son œuvre est reçue avec indifférence, un parfait détachement, une profonde sérénité. Les prêtres bouddhistes prononcent son nom avec révérence, et une pointe de jalousie.
– Avec ou sans ?
J’ai répondu avec
et il a mis un glaçon dans mon verre alors que je voulais une lune dans ma
nuit.
Parce qu’enfin,
plaident les teckels les plus rebelles, il est bien évident que nous sommes les
figures les plus importantes de la Communauté. Propriétaire, il est possible de
l’être de tant de choses que cette qualité ne saurait définir absolument un être.
Tandis que teckel, excusez du peu, c’est teckel à l’exclusion de tout le reste,
ça vous ferme même toutes les autres portes. Teckel, c’est un summum. Nous nous
suffisons à nous-mêmes.
Nous ne saurions laisser à nos enfants déjà bien éprouvés les soins et démarches pénibles relatifs à l’organisation de nos funérailles. C’est pourquoi je me suis rendu dans une agence de pompes funèbres afin de choisir le bois de mon cercueil. J’ai opté pour du chêne, une belle essence aux sombres reflets dorés, puis passé commande d’un banc, tout bien réfléchi.
Elle secoue sa boule de
cristal et m’annonce de la neige.
Plusieurs propriétaires
de la C.P.T.D. ont été mordu par leurs chiens ces derniers jours. Il semblerait
que les teckels soient de plus en plus nombreux à s’interroger sur la nécessité
et l’utilité même de la présence des maîtres dans la Communauté.