jeudi 30 novembre 2023

5568

Cependant, l’éjaculation décisive du père ne fut-elle pas une sorte d’accouchement déjà ?

 

La conversation haut perchée de ces deux dames assises à une table peu éloignée de la mienne, dans le café où j’ai mes habitudes, m’empêche de me concentrer sur mes écritures. Assez vite, je comprends à leurs échanges qu’elles travaillent dans l’édition. Voyez donc à quelle forme abjecte de déloyauté en arrive la concurrence dans ce milieu ! Les éditeurs emploient désormais du personnel dont la seule mission consiste à nuire au travail des écrivains publiés dans d’autres maisons… Lamentable !

 

Non seulement la mouche marche au plafond, mais elle se colle au carreau sans s’écraser le nez. Et nous devrions être surpris d’apprendre qu’elle survivra à l’homme ?

mercredi 29 novembre 2023

5567

Jamais un bonjour, jamais un bonsoir, jamais prêt à rendre service, je me montre fort peu aimable avec mes voisins, je ne leur tiens même pas la porte, n’ayant aucune envie de passer pour un serial killer dans mon immeuble.

 

La lionne est plus rapide que le lion. Disposition judicieuse qu’un Créateur lucide et miséricordieux eût octroyée aussi à l’espèce humaine.

 

Tout pour moi ne s’accomplira pas dans cette vie. J’ai le temps. (Au moins aurais-je souri tristement de cette immodeste pensée.)

mardi 28 novembre 2023

5566

Le violoniste scie la branche sur laquelle est perché son rossignol.

 

Souvent l’on me demande quels sont mes secrets, comment je parviens à écrire des phrases pareilles, à créer ainsi l’illusion avec des mots. Vous l’aurez compris, il y a un truc et, ce truc, je ne me ferai pas prier pour le révéler, voilà : j’utilise un œuf de lapin à double fond. Or comme vous voyez, connaître le truc ne suffit pas – essayez un peu d’écrire une phrase pareille avec un œuf de lapin à double fond –, encore faut-il que la virtuosité du geste le dérobe aux regards, et ça, c’est tout un art.

 

La tipule marche sur l’eau. J’attends un peu. Et si elle la changeait en vin ?

  

[Rappel : nouvelle étape du Marathon autofictif, samedi à 20 h à la Maison de la poésie.]

 

lundi 27 novembre 2023

5565

Le noir corbeau est une nuance du bleu ciel.

 

À l’exception de ces notes, réflexes nerveux, battements de paupières, il me vient peu de littérature ces temps-ci. Et je me demande en conséquence si je n’ai pas donné déjà tous les livres qui restaient à écrire. Cela ne me procure ni joie ni peine, je suis juste un peu embêté pour les autres écrivains réduits au chômage par ma faute aussi sûrement que si je les avais licenciés.

 

La coccinelle s’essore comme d’autres soulèvent jupes et jupons pour traverser un terrain boueux.

dimanche 26 novembre 2023

5564

Le papillon ne volette pas. Il feuillette.

 

Pardon, monsieur auriez-vous du feu ?

Le passant qui me héla ainsi avait des cornes et une queue fourchue. Je marquai mon étonnement. Il m’avoua qu’il avait épuisé ses réserves.

L’homme est une si sale engeance, ajouta-t-il en s’éloignant avec mes allumettes.

 

Ses jambes si fines n’auraient-elles pas elles-mêmes tissé leurs bas résille ?

samedi 25 novembre 2023

5563

On nous dépose d’autorité dans un berceau à la naissance. Personne pour nous demander si nous ne préférerions pas l’urne.

 

Son profil droit se découpe magnifiquement sur son profil gauche.

 

C’est un don. Je sais réparer les miroirs fêlés. Il suffit que je m’en éloigne.

 

vendredi 24 novembre 2023

5562

Plutôt que de semer des cailloux afin de retrouver son humble chaumière, le petit Poucet aurait dû en ramasser beaucoup d’autres et édifier pour lui et ses frères au bout du chemin un Palais Idéal.

 

Ce globe lunaire fera un parfait plafonnier pour ma clairière. Je le prends.

 

Il serait excessif de parler d’invasion. Mais il est sûr que si deux ou trois fourmis encore se joignent aux autres…

 

[Amis italiens, parution aujourd’hui de mon roman Dino Egger, traduit par Gianmaria Finardi, chez Prehistorica editore.]

jeudi 23 novembre 2023

5561

N’est-ce pas la preuve qu’il filait un mauvais coton ? La corde à laquelle il a voulu se pendre a rompu.

 

Les branches flexueuses du noisetier font les meilleurs arcs. L’écureuil n’y revient que pour mieux rejaillir.

 

Et d’ailleurs, qu’est-ce que le javelot sinon un coup d’épée dans l’eau de Javel ?

mercredi 22 novembre 2023

5560

Quatorze ans aujourd’hui que mon père a quitté ce monde. On dirait que c’était hier.  Or c’est à peu près aussi le temps qui me reste si la mort me prend au même âge que lui. Demain, donc.

 

Verte encore, la feuille du platane déjà évoque une main humaine, mais quand, avec l’automne, elle se couvre de tavelures, le doute n’est plus permis : c’est une main humaine.

 

Quant à savoir comment s’habiller en novembre, la question est vite résolue, on portera le deuil.

mardi 21 novembre 2023

5559

Eh bien, moi, j’aurais honte si mes livres déclenchaient une irrésistible compulsion d’achat chez le paisible quidam entré dans une librairie pour y acquérir une gomme ou un mug.

 

Ce n’est pas ce genre de réflexe ou de désir trivial qu’ils ambitionnent d’éveiller. Ils ne s’adressent pas au consommateur grégaire mais à l’individu unique, riche de sa personnalité originale. Alors je les ai voulus suffisamment âpres et revêches pour écarter le premier et provoquer la curiosité du second.

 

Non sans succès. Les consommateurs grégaires s’abstiennent et un unique individu en fait l’emplette.

lundi 20 novembre 2023

5558

La masculinisation des quelques noms de métiers confisqués éhontément par les femmes a commencé avec, pour sage-femme, le très heureux maïeuticien. Poursuivons sur les mêmes bases le rigoureux travail engagé par le lexicologue. Pour dame-pipi, donc, je suggère épipicurien et, pour fille de joie, hédoniste. Ou comment abolir d’un coup des siècles d’iniquité. On respire !

 

Le présent est une sempiternelle pluie de cendres.

 

Je me surpris à douter de la réalité de mon genou. Mon scepticisme pourrait-il abolir le monde ? Puis-je encore l’en empêcher ? Le faut-il ?

dimanche 19 novembre 2023

5557

Un matin, donc, on ne trouva plus d’endives. Et l’on comprit que, lasses de ces longs hivers, elles avaient décidé de migrer avec les autres hirondelles.

 

Il est passé à la postérité. Son œuvre est lue, traduite, commentée, rééditée, préfacée, étudiée. Et vraiment, là-haut, sur son nuage, il se réjouit – de n’avoir plus d’entrailles, car vingt fois par jour, il vomirait.

 

Il suffirait d’alterner les marches qui montent et celles qui descendent pour obtenir un escalier horizontal beaucoup moins casse-gueule.

samedi 18 novembre 2023

5556

L’imperméabilité de son pelage et l’étanchéité de son cuir disposent d’autant mieux la loutre à devenir, après un bref passage chez le tanneur et le maroquinier, l’outre parfaite que l’opération sera facilitée et les délais d’exploitation réduits par le fait même que nous n’aurions pas à changer son nom…

 

Le soliflore nous avait pourtant prévenus. Il a saisi la deuxième rose à la gorge et l’a étranglée.

 

Tantôt, c’est une montagne qui a poussé sous ses pieds. Tantôt , c’est le désert qui s’est fait autour de lui. Mais l’ermite préfère laisser croire qu’il s’est retiré.

vendredi 17 novembre 2023

5555

Je ne manque pas d’idées pour redynamiser le secteur du conseil funéraire qui ronronne un peu, me semble-t-il, et se repose paresseusement sur ses routines. Et, par exemple, pourquoi réserver nos soins aux affligés ? Il doit pourtant être possible d’apporter aussi un peu de désolation aux gens heureux !

 

Nous pourrions également sortir de notre pré carré. Les compétences du conseiller funéraire seront appréciées dans le domaine de l’événementiel. Il sera de même un parfait maître de cérémonie pour vos fêtes privées et vos soirées libertines. Ce n’est pas parce que l’on s’amuse qu’il convient d’oublier qu’une ombre plane.

 

Et pourquoi n’y a-t-il jamais de toboggan dans les jardins du souvenir ?

jeudi 16 novembre 2023

5554

Je ne devrais pas manquer de travail dans les temps prochains. Le conseiller funéraire est l’homme de l’avenir. Sa présence est requise sur les zones de guerre, sur les territoires menacés de submersion ou de désertification. Tous ces champs où son expertise est souveraine sont déjà nombreux. Ils sont de toute évidence appelés à se multiplier.

 

Enfin, je vais faire œuvre utile !

 

Je saurai conseiller la veuve et l’orphelin afin que jamais ne tarisse la source de leurs larmes. Il y a des petites astuces à connaître pour aviver les plaies, pour augmenter la douleur des séparations définitives, pour élargir le gouffre et creuser l’abîme. Il est temps de dénoncer le leurre des consolations. Je médite déjà de rendre les funérailles plus lugubres encore. Puis ne faudrait-il pas ôter le capiton des cercueils afin de sortir le défunt aussi de sa zone de confort ?

  

[Nouvelle étape du Marathon autofictif de Christophe Brault, le samedi 2 décembre à 20 h à la Maison de la poésie. Réservation recommandée par votre conseiller funéraire.]

mercredi 15 novembre 2023

5553

Oui, je m’avise aujourd’hui que j’ai toujours eu cette vocation de conseiller funéraire. Ni mes parents ni mes professeurs n’ont su la déceler et m’orienter vers cette voie. Et j’ai choisi la littérature comme un pis-aller. Sans le savoir, j’ai pourtant opté donc pour l’activité qui se rapprochait le plus de celle du conseiller funéraire. Inutile, je suppose, de souligner ici tous les points communs évidents qui existent entre elles.

 

S’exerçant l’une et l’autre de surcroît dans un doux et délétère climat de mélancolie.

 

Puis cette manie que j’ai d’offrir, en guise de bouquets, des couronnes à mes petites amies et qui précipite effectivement la dissolution dans le néant de mes relations amoureuses. De tels indices auraient dû m’alerter.

mardi 14 novembre 2023

5552

Conseiller funéraire… c’est donc à cette fonction ingrate et déprimante que m’assigne, à l’exclusion de toute autre, mon bilan de compétences. J’en fus d’abord mortifié, je ne le cacherai pas, très désappointé, vexé même. Je m’étais laissé aller à rêver aux horizons que m’ouvrirait une carrière dans le mannequinat, la gouvernance d’une république démocratique ou l’animation de jeux télévisés, ils se referment.

 

Je me suis ensuite renseigné sur le rôle exact et les attributions précises d’un conseiller funéraire. Celui-ci reçoit donc les familles endeuillées. Il organise avec elles la cérémonie des obsèques, facilite leurs démarches administratives, les aide à choisir un cercueil ou une urne, tel ou tel type de sépulture, les fleurs mêmes et tous les ornements mortuaires. Son activité le met quotidiennement en contact avec des professionnels d’autres secteurs, thanatopracteurs, fossoyeurs, marbriers, pleureuses, gardiens de cimetière.

 

Tout ce à quoi j’aspire depuis l’enfance !

lundi 13 novembre 2023

5551

Je veux bien croire que la littérature nourrisse le malingre Houellebecq ou la fluette Angot, mais un colosse de mon acabit… La situation ne pouvant plus durer, je me suis résolu à me reconvertir. Mais en qui ? Mais en quoi ?

 

Je me suis donc soumis à un bilan de compétences, à l’issue duquel le consultant m’a confirmé que je possédais fort peu de dispositions, talents naturels ou aptitudes acquises, nul savoir-faire, aucune expérience utile, et que j’étais en conséquence parfaitement inapte à l’exercice de toutes les professions répertoriées. À l’exception d’une seule, sourit-il enfin. Mais alors, pour celle-ci, ajouta-t-il, vous présentez des qualités remarquables qui se rencontrent rarement chez un même individu, un profil idéal, unique, pour le dire simplement. Mais quoi ?! m’enquis-je avec impatience. Pour quel métier suis-je si merveilleusement doué ?

 

– Conseiller funéraire.

dimanche 12 novembre 2023

5550

Il n’empêche qu’on aimerait savoir à quoi ressemble le rhinocéros dessous.

 

Elle prend un air bien sévère pour boire son thé, avec cette petite bouche pincée. C’est sa tasse qui se fait tirer l’oreille. On se demande bien pourquoi.

 

Et pourtant le phasme fait un usage fort subtil du pléonasme.

 

samedi 11 novembre 2023

5549

Toute sa mémoire s’est effacée, ou presque. Il n’a plus que le souvenir d’une nuit avec Marylin Monroe. Encore n’est-il plus très sûr du nom de la fille.

 

anguille sous roche

la source

puis le ruisseau insaisissable ondule entre les herbes

 

En vain tu cherches un coin tranquille sur la terre. Mais dessous…

 

vendredi 10 novembre 2023

5548

Je vieillis, c’est vrai. Souvent, la lassitude point. Mais je ne pensais vraiment pas entraîner comme ça le monde dans mon déclin ! Est-il temps encore d’inverser le cours des choses, de rétablir les équilibres menacés, d’éviter la guerre ? Si je me secoue un peu, si je me reprends en main ?

 

Après un an, le mois de novembre est toujours aussi enrhumé…

 

J’ai cherché un animal pour lui confier mon dégoût de l’humanité – à qui d’autre ? J’ai trouvé un escargot. Il n’a rien répondu, mais j’ai compris à sa moue qu’il partageait mes conclusions.

jeudi 9 novembre 2023

5547

Sa barbe couvre sa trogne effroyable, dérobe sa panse flasque, dissimule ses genoux cagneux. Mais on le reconnait quand même à l’ongle jaune et crochu de son gros orteil.

 

Comédien, mon ami, juste une question : est-il moralement défendable de jouer avec talent et expressivité la douleur causée par la mort brutale d’un fils dans un téléfilm de qualité médiocre ?

 

Quand l’espèce s’éteint, au moins la cage se vide.

mercredi 8 novembre 2023

5546

Une extrémité de la craie contient les chiffres ; l’autre, les lettres. L’enfant la saisit par le milieu et l’approche de son ardoise sans se douter que tout son avenir se joue à cet instant.

 

Ils arrivent chez la belle avec des bouteilles, des gâteaux, des fleurs. Moi, je me suis pointé les mains dans les poches et j’en ai sorti le suffisant bouquet de mes dix doigts.

 

Avec quelle confiance nous posons la tête sur l’oreiller, sachant pourtant que la mort est dessous.

mardi 7 novembre 2023

5545

Nous laisserons désormais aux femmes le soin de dresser les pit-bulls. L’homme n’aura droit qu’au bichon. Alors l’harmonie sur la Terre deviendra peut-être un objectif réaliste.

 

Je cherche l’or du temps, disait Breton. Eh bien, moi, je sais où cet or loge.

 

MOI – Des soirées pyjama, ma belette, je peux te dire que j’en ai fait des centaines… Et les jours de semaine en plus !

SUZIE – Oh, la chance !

MOI – Hé oui ! Pas moins de cinquante lits dans le dortoir de l’internat du collège Saint-Gabriel.

 

lundi 6 novembre 2023

5544

France Télévisions diffuse une collection de téléfilms policiers intitulée Meurtres à…Toutes les communes françaises idéalement pourraient l’une après l’autre servir de décor. Il s’agit en effet aussi d’un tour de France de nos belles régions desquelles la caméra caresse façon carte postale les beautés naturelles et architecturales, châteaux, églises, places, plages, forêts, arcades, ruelles pittoresques, pour s’arrêter soudain avec un hoquet sur un corps atrocement mutilé, cloué sur la croix d’un illustre calvaire, noyé dans un lavoir gothique flamboyant ou écrasé au pied d’un donjon… Je ne sais plus où passer mes vacances.

 

Menthe-réglisse, toutes les pies ont le même goût.

 

Disparition des glaciers, extinction des espèces, appauvrissement du lexique… fontes… L’œuvre accomplie se défait. Quelle création désormais pourrait ne pas s’évanouir en touchant terre ?

dimanche 5 novembre 2023

5543

Voici revenue la saison d’activité des souffleurs de feuilles. Employés le restant de l’année à ramasser du bout de leur index humecté les pétales de marguerites effeuillés négligemment par les amants d’un soir et les élytres des bêtes à bon Dieu abattues en plein vol par leur créateur, ils ont de l’énergie à dépenser et, sitôt autorisés à faire vrombir leurs moteurs, se livrent à leur passion avec une frénésie qui peut déconcerter le passant débonnaire.

 

Un temps de pose de trente minutes était nécessaire aux premiers radars autoroutiers pour obtenir un cliché net d’une automobile en excès de vitesse.

 

Elle m’avait demandé de passer chez elle en son absence pour nourrir son chat et arroser ses plantes. Je constatai avec soulagement en arrivant qu’elle avait tout préparé pour moi. Je mis les poissons dans la gamelle du chat et versai au pied du ficus et du rhododendron l’eau de l’aquarium.

samedi 4 novembre 2023

5542

Certaines journées sont mieux employées que d’autres. Ainsi ai-je passé celle d’hier, depuis le matin 8 h jusqu’au soir 23 h, à rouler puis réintroduire dans son petit sac un matelas autogonflant. La nuit venue, vous pouvez me croire, je n’étais pas peu fier.

 

De la grenouille, nous ne mangeons que les cuisses et, d’ailleurs, force est de constater qu’il n’y a en effet qu’elles qui se sauvent à notre approche.

 

Je crus qu’il élaguait le grand platane du jardin de l’Arquebuse. Une pancarte au pied du tronc me détrompa : il entretenait le patrimoine arboré de la ville.

 

vendredi 3 novembre 2023

5541

Oh non ! Qui sont ces déménageurs qui vident l’appartement en rez-de-chaussée de madame Mouillefarine, notre vieille voisine claudicante et si aimable, à l’angle de la rue ? Ses volets étaient fermés depuis quelques semaines. Nous étions inquiets. Et maintenant ces déménageurs qui font place nette…

 

Serait-elle morte ? Oh non ! Installée dans un EHPAD ? Elle avait beaucoup maigri, sa voix se brisait après quelques mots. Comment allons-nous vivre sans madame Mouillefarine ? Sans la silhouette claudicante de madame Mouillefarine au bout du trottoir ?

 

Puis voilà qu’emménage dans son appartement déserté une jeune femme bien encombrée de tous ses cartons. – Un coup de main ? Mais non, cela ne m'ennuie pas, c’est bien la moindre des choses entre voisins... Comme est ingrat et oublieux le cœur de l’homme !

jeudi 2 novembre 2023

5540

Et ma tante Lénou ? Comment faites-vous pour ne pas penser à ma tante Lénou quand vous suçotez un petit verre de liqueur de cassis ?! À l’occasion, confiez-moi votre secret.

 

Qui lit beaucoup depuis l’enfance vivra toujours dans un double récit, celui de son existence concrète et celui de la littérature, ce qui signifie aussi bien qu’il évolue dans un double temps, une double chronologie dont sa biographie définitive devrait tenir compte. Il risque évidemment de trouver le récit de sa vie propre décevant et le réel vulgaire par rapport à la fiction. Ce sera en partie de sa faute : il aura jeté dans le rêve et les spéculations la moitié de ses forces vives.

 

Cette bourgeoise porte un long manteau de velours côtelé. Affligeant spectacle. Combien de vieux poètes et érudits folkloristes a-t-il fallu abattre dans leurs tanières pour confectionner un tel vêtement ? On ne veut plus voir ça.

 

mercredi 1 novembre 2023

5539

C’est aussi qu’il ne sert à rien de s’appliquer sur la tempe le goulot d’une bouteille.

 

Il fait des rêves si surprenants, si complexes, si intenses, qu’il n’a pas trop de toute une journée ordinaire parfaitement plate et ennuyeuse pour se remettre de ses émotions de la nuit.

 

Mon oncle Henri, passé l’âge de 90 ans, prit l’habitude de se réabonner pour deux ans à ses journaux et revues. Stratégie efficace puisqu’il fit un alerte centenaire que la mort saisit finalement en traître avant qu’il ne porte à la poste ses bulletins de renouvellement.