Pour
ma part, je peux me regarder dans le miroir sans rougir. Depuis, 1987 et la
parution de mon premier livre, je fais ce qu’il faut pour ne pas entamer
les réserves, je gère le stock avec modération, en bon père de famille, je
veille, j’économise, je décrois, on ne me fera pas ce procès du gaspillage et
de la gabegie, je ne gâche de papier que le strict minimum en orchestrant très
en amont, dès le processus de création, en usant par exemple du mot adamantin,
la modeste distribution future de mes livres. Il y en a qui voient loin, et d’autres
dont le nez se casse contre le mur de leur chambrette. La pénurie
de papier qui menace aujourd’hui l’édition ne saurait en aucune manière m’être
imputée. Je connais, en revanche, certains écrivains dont la responsabilité est
très compromise dans cette affaire et qui vont mal dormir cette nuit. Tant pis
pour eux. Tout se paye. Tout a un prix. Et pour la gloire, cela se confirme
aujourd’hui, il s’agit même d’une rançon.
Le
pain quotidien devint un hebdomadaire, puis un mensuel.
Le
tabagisme passif a tout de même du bon ; l’alcoolique n’est-il pas sans
cesse obligé de lever le coude lui-même ?
[Malgré
tout, le prochain volume de ce journal, L’Autofictif nu sous son masque,
paraîtra en janvier. Comme chaque année, l’éditeur propose une
souscription pour les lecteurs qui souhaiteraient recevoir le livre
dédicacé (ainsi que le masque sous lequel en effet je suis nu).]