dimanche 2 octobre 2022

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À quel moment cette idée qui m’était venue dans la rue et que je me promettais de noter à la première halte m’a-t-elle quitté ? Où s’est-elle dissoute ? Quelle est désormais sa forme dans l’éther, sa trace ? À moi, il ne reste que la conscience aiguë et douloureuse de son oubli. J’en conclus provisoirement que toutes ces passionnantes questions me feront une note qui se substituera avantageusement peut-être à l’idée perdue. Ce petit calcul de ma cupidité me console un peu, mais la plaie reste vive – et béant, ce trou, dans l’histoire des philosophies.

 

Puis voilà que l’idée ressurgit, deux heures plus tard, dans le train, sans raison. Se présente à mon esprit le mot kalachnikov – que j’avais écarté pourtant en formulant mentalement ma phrase dans la rue, lui préférant fusil automatique. Et tout me revient d’un bloc. C’est donc la note ci-dessous. Valait-elle ce sentiment de deuil irrémédiable qui m’accablait ? Toujours est-il que ma page du jour est écrite.

 

Habitué à prendre congé sur ce mot, il lance par réflexe un bisou ! au malheureux qu’il fauche d’une rafale de son fusil automatique.